Crédit immobilier : quand la reprise toque à la porte !

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Cr\u00e9dit immobilier : quand la reprise toque \u00e0 la porte !

Depuis 2019, le nombre de ménages détenant des crédits immobiliers recule. Dans un paysage économique et financier tourmenté, dominé par le rationnement de l’accès au crédit imposé par la Banque de France et le Ministère de l’Economie, la baisse s’est encore accentuée en 2023. Mais depuis janvier la reprise s’est amorcée et se renforce. L’analyse de Michel Mouillart, professeur émérite d’économie, FRICS.

Et cette baisse n’est pas récente, même si beaucoup ont été surpris de « découvrir » récemment les conséquences qu’elle imprime sur l’activité des marchés immobiliers.

Mais comme cela était attendu, la plupart des indicateurs actuellement disponibles ont permis de détecter un retournement de conjoncture, dès la fin de l’automne dernier. Et maintenant, la baisse des taux des crédits immobiliers paraît bien enclenchée, l’offre de crédits se redresse et, par exemple, le nombre de compromis signés dans l’ancien se ressaisit. Certes, le chemin du retour à la normale sera long, la Banque de France s’étant arcboutée sur une décision largement déconnectée de la réalité économique et sociale.

Et précisément, là se trouve sans aucun doute une des craintes qu’il faut nourrir sur l’avenir du système de financement de secteur du logement en France et donc, sur la capacité que les marchés immobiliers auront à rebondir nettement et d’une manière durable.

Mais pour l’heure, le printemps refleurit aussi pour les marchés de l’immobilier résidentiel !

Un recul historique !

D’après la dernière enquête de l’Observatoire des Crédits aux Ménages, 29.6 % des ménages détenaient des crédits immobiliers à la fin de l’année 2023. Ce taux de détention est redescendu vers son point le plus bas de ces 20 dernières années. Et il est presque certain qu’en 2024, la proportion de ménages détenant des crédits immobiliers va encore diminuer : le rebond attendu dans la production de crédits sera insuffisant et ne permettra pas d’inverser la tendance récessive actuellement à l’œuvre.

Car en fait le repli actuel n’est pas nouveau : dès 2021 le taux de détention des crédits immobiliers a commencé à diminuer. Sous l’effet du resserrement de l’accès au crédit, de la perte d’efficacité des soutiens publics à l’accession à la propriété (remise en cause du PTZ dès 2017, suppression de l’APL-accession…) et à l’investissement locatif privé, puis à partir de l’été 2022 de la remontée des taux des crédits immobiliers, le recours aux crédits immobiliers s’est fait moins intense. L’usage des crédits destinés à l’accession à la propriété et à l’investissement locatif privé a alors reculé, comme d’ailleurs le financement des travaux sur le logement : à cet égard, les évolutions récentes confirment des tendances qui se renforcent au fil des années, en dépit des annonces si souvent répétées et rapidement remises en cause d’un soutien public à la rénovation énergétique des logements.

Ainsi, entre 2020 et 2023, le nombre de ménages détenant des crédits immobiliers en cours de remboursement a baissé de près de 290 000 unités. Ce nombre est impressionnant si on se souvient que la crise économique et financière venue des Etats-Unis ne s’était soldée que par un recul de 100 000 du nombre des ménages en cours de remboursement entre 2008 et 2010 ; et que la crise ouverte par la suppression du PTZ dans l’ancien à compter du 1er janvier 2012, puis par les remises en cause des investissements immobiliers des ménages durant les années 2012 à 2014 ont été à l’origine d’une diminution de « seulement » 160 000 unités !

Une telle évolution n’est guère étonnante, dans un environnement aussi dégradé. Il suffit de se souvenir qu’entre 2019 et 2023, d’après l’Observatoire du Financement du Logement de l’Institut CSA, le nombre des ménages accédant chaque année à la propriété a diminué de 266 000 unités (631 000 nouveaux accédants en 2023, contre 897 000 en 2019) : ce que le récent rapport du Conseil National de l’Habitat a clairement mis en évidence (« Redynamiser l’accession à la propriété », septembre 2023).